Distance parcourue : 10 MN

Nous voilà partis pour un saut de calamar qui va nous propulser du port de Nes vers un mouillage situé à l’extrémité Est de l’île d’Ameland, dernière étape avant de faire un grand saut vers l’Allemagne. Nous souhaitons encore profiter d’un arrêt dans la Mer de Wadden à l’échouage ou au mouillage avant de passer en Mer du Nord pour rejoindre le port de Nordeney. Ca, c’est l’envie. Maintenant, la voix de la raison : nous serons à proximité du « gat » pour le passer de bonne heure et à la bonne heure le lendemain car l’étape vers Nordeney est longue, environ 55 MN. Si le saut d’aujourd’hui est petit par la distance, il est grand par le travail de préparation. C’est notre deuxième passage dans les chenaux de la Mer de Wadden.

Ameland vue du ciel. Les tentacules de chenaux créées par le courant. Parmi elles, un seul passage à suivre avec précision.

Debout à 6h20, je regarde le lever du soleil arroser le mouillage de sa lumière avant d’aller réveiller Colette. Il fait très doux et le ciel promet une belle journée ensoleillée. Un petit vent de Sud-Sud-Ouest 5 nœuds balaye mon visage.

A 8h20, bateau et équipage sont prêts et nous larguons nos amarres du ponton. Au menu navigation ce matin : un petit chenal avec un endroit peu profond qui découvre à marée basse. Nous sommes à 40 minutes de la pleine mer lorsque nous partons. La zone de hauts-fonds qui découvre à marée basse se trouve à environ 5 MN de Nes et nous y serons dans environ une heure, soit 20 minutes après la pleine mer. Il y aura encore suffisamment d’eau pour la passer.

Notre intention est d’aller nous échouer vers De Hon à environ 2h de Nes, une réserve naturelle qui se trouve à l’extrémité Est d’Ameland pour la journée. La marée sera basse vers à 15h30 et lorsqu’elle sera remontée et que Strana flottera à nouveau, nous reviendrons dans une zone plus profonde pour passer la nuit à flot sur ancre plutôt qu’à l’échouage. Il devrait y avoir un peu de courant quand nous arriverons à notre destination et le vent annoncé sera du Sud puis du Sud-Ouest pour finir Nord-Est, 9 nœuds faiblissant à 5 nœuds. Nous seront moyennement protégé du vent, mais vu sa vitesse, nous ne risquerons pas grand chose. La hauteur des vagues ne dépassera pas 30 cm de hauteur. Une nuit confortable se profile à l’horizon.

Notre route.

La navigation se fait au moteur pour les mêmes raisons que la veille : chenal étroit et tortueux. Dans la partie profonde du chenal, nous passons sur les ruines sous-marines d’une digue qui a été construite en 1872 avec l’intention de regagner des terres sur la Mer de Wadden et de relier Ameland au continent. Cette digue aura tenue 9 ans avant de céder devant les assauts de la mer en une nuit, lors de la tempête du 4 octobre 1881. La nature a gagné. Ses défenseurs se sont assurés que cette victoire était définitive.

Le chenal est bien balisé par des marques rouges et vertes. Elles sont numérotées sur la carte marine et nous surveillons notre position sur la carte et par rapport à ces marques. Maintenant, le sondeur à bord nous indique 2,4m de profondeur. Un coup d’oeil sur la carte indique qu’à marée basse, à cette endroit précis, nous ne passerions pas avec Strana car il y aurait une profondeur de 20cm seulement ; une mare aux canards. Grâce à notre suivi précis des marques de chenal, nous savons maintenant que nous approchons de la partie délicate du parcours. A marée basse, la section à venir est recouverte au mieux de 8 cm d’eau avec le coefficient de marée d’aujourd’hui. Ce n’est plus une mare mais une flaque. Comme nous sommes à la bonne heure, le passage se fait sans difficulté mais un doute subsiste toujours car le mouvement rapide des bancs de sable peut toujours semer quelques pièges sur le chemin.

Le rouge se voit bien sur l’eau. Noter la légère différence de couleur de l’eau qui suit la ligne des balises.

En cette matinée, la réalité météo c’est la prévision presque en mieux: Ciel bleu éclatant, mer magnifique, une belle visibilité, 8 nœuds de vent Sud-Sud-Ouest. Partis tôt, nous arrivons sur la zone où nous souhaitons passer la nuit vers 10h. Je prends la direction plein nord vers l’île pour tester jusqu’où nous pouvons aller pour l’échouage. Il y a un vieux gréement hollandais à l’ancre dans notre 330° dans -1,5 de sonde sur la carte. Je surveille le sondeur La sonde passe à 1,9m. J’hésite encore un peu à faire cet échouage diurne.

Lui n’a pas hésité à s’échouer.

Finalement, nous faisons demi-tour pour rejoindre une zone avec une sonde de 2,3m sur la carte pour mouiller en eau libre quelque soit la marée. Au moment de jeter l’ancre, nous avons 5 mètre au sondeur (marnage + sonde de la carte marine) et nous larguons 30m de chaîne (6 fois la hauteur d’eau). Vu les conditions de vent, nous pourrons dormir tranquille.  De plus, les fonds de sable et de vase sont des terrains que notre ancre charrue laboure avec délectation. Elle finit toujours par trouver sa place profondément enfouie pour y passer la nuit.