Le réveil est difficile. Nous sommes fatigués tous les deux malgré une bonne nuit de sommeil, mais nous décidons tout de même d’exécuter le programme prévu : une visite du Nord-Est de l’île de Lolland à vélo de Kragenæs à Nakskov avec deux lieux remarquables : Dodekalitten et Frederiksdal. Une escapade de 40 kilomètre à travers la campagne avec retour en bus.

Histoire de se dérouiller, nous commençons par une grimpette pour rejoindre la route principale qui mène au ferry. Cette petite montée achèvera de nous réveiller. C’est une belle journée ensoleillée qui inaugure ce mois de juin. Nous sommes à l’heure pour prendre le ferry. À peine, deux kilomètres séparent Fejø de Lolland. Au port de Kragenæs, nous prenons quelques instants pour observer le port de plaisance. Il est bien plus fréquenté que celui de Dybvig. Nous ne regrettons pas d’avoir choisi ce dernier. En plus, il y a le charme de prendre le ferry pour traverser. L’éloge de la lenteur…

Traversée vers Lolland.

Dodekalitten est une curiosité que nous avions repérée sur le guide de tourisme local dès notre arrivée sur l’île de Falster (Gedser, Nykobing) voisine de Lolland. Le site se situe à deux pas du port de Kragenæs. Nous gravissons une petite montée sur un chemin de terre, vélos à nos côtés, fatigue oblige. Douze colonnes de granit sculptées nous entourent. 7 à 9 mètre de haut, pesant chacune entre 25 et 55 tonnes, monumental. Cette œuvre, créée par Thomas Kadziola (sculpteur) et Wayne Siegel (musicien), est en cours de réalisation. Débuté en 2010, elle devrait être achevée en 2025.

Le site « Dodekalitten ».

Les douze apôtres ou les douze salopards tenant conseil ? La sévérité des visages pencherait pour la deuxième option. À moins que ce ne soit douze vikings. De vraies brutes, mais, placées au sommet d’une colline avec vue sur la mer, le lieu est tout de même propice à la relaxation. En nous déplaçant, nous déclenchons ce qui rend le site unique. Une musique sort de terre, générées à partir des éléments qui composent notre paysage nautique quotidien : le lever du soleil, le coucher du soleil, les marées. Étrange. Nous nous asseyons au centre du cercle des pierres apparues et nous nous laissons transporter quelques minutes par ces sons, avant de nous laisser transporter par nos bicyclettes pour entamer notre périple.

Mine patibulaire de nos vikings.

Déjà vues à Fejø, les maisons au toit de chaume sont présentes dans chaque village traversé. Également déjà vu Fejø, l’arbre aux fleurs jaunes. La curiosité (et la fatigue) nous fait faire une pause pour chercher le nom de cet arbre : le cytise, appelé aussi glycine jaune ou faux ébenier. Il est éclatant à la floraison, mais toxique pour les animaux et les humains. Ici, il est bien implanté, car il résiste bien au froid. Apparemment depuis longtemps, parce que ce sont de vrais arbres, pas des arbustes. Le parfum de ses fleurs se mélange à celui des lilas qui sont aussi en fleurs.

Nous continuons à pédaler en direction de Frederiksdal pour aller à la rencontre de la deuxième curiosité du jour : le vin de cerise (kirsebærvin). Pour y aller, nous serpentons à travers les champs de cerisiers pour arriver à un superbe manoir digne d’un château bordelais. La cerise est vinifiée de la même manière que le raisin. La cave se visite, mais nous ne ferons que la dégustation, car de nombreux groupes s’arrêtent et les employés sont bien occupés. Nous le trouvons à notre goût. Son histoire est récente et c’est notre pays qui a inspiré un des créateurs. Il a passé plusieurs années en Languedoc-Roussillon à travailler chez les producteurs de Banyuls et Maury. De retour au pays, la rencontre avec un producteur de jus de cerise a créé une spécialité unique et savoureuse. Nous repartirons avec le maximum de bouteilles autorisées par notre moyen de transport, une bouteille dans chacun de nos paniers, avec la certitude de faire une commande à notre retour à la maison. Je peux vous dire qu’elles ne feront pas beaucoup de miles nautiques avec nous ces deux-là…

Nous approchons de Nakskov, un nom à consonance slave, mais qui est bel et bien ses racines dans les anciennes langues nordiques : nakke (mot encore vivant en Norvège) qui signifie colline et skov traduit par forêt. Les collines, nous les avons sentis dans les jambes ; la forêt… disparue, probablement dans la construction navale qui a été une activité prospère de la ville, ou bien consumée par le froid de l’hiver. Le centre-ville est agréable à visiter. Nous y mangerons avant de repartir assis dans l’autobus qui nous ramènera à Kragenæs avec les vélos dans son coffre. Un autre moyen de flâner confortablement installé.